Le voyage initiatique d’un jeune garçon un peu simple d’esprit qui décide de traverser le pays avec un troupeau de dindes afin de faire fortune.

couverture du roman d'apprentissage "La longue marche des dindes" par Kathleen Kaar. Chronique littéraire O. Carol

4ème de couverture:

Plus personne ne peut vous dire comment les bons élèves de cette école de campagne du Missouri ont occupé leurs vacances d’été 1860. Non. Le seul qui soit resté dans les mémoires, c’est Simon Green, le pire élève de toute l’histoire des Etats-Unis d’Amérique.

Cette année-là, les dindes avaient tant pondu qu’elles valaient des clopinettes. A Denver, à mille kilomètres d’ici, on bâtissait à tour de bras, et rien à se mettre sous la dent. Là-bas, ils étaient prêts à payer une dinde cinq dollars. C’est bien simple: à peine sorti de l’école, Simon a fait ses comptes. A acheté mille dindes. Et s’est juré de faire fortune avant la fin de l’été.

« La longue marche des dindes », par sa forme et son ton léger et rocambolesque, rappelle le roman picaresque mais est avant tout un roman d’apprentissage (genre auquel appartient un classique américain comme « Les aventures de Huckleberry Finn » de Mark Twain). Au-delà de ce genre, on retrouve tous les éléments du western : les grandes plaines sauvages, les indiens, la cavalerie, un cirque ambulant, des brigands, une attaque de sauterelles, une famille de pionniers décimée et dont la seule survivante est une jeune fille que l’on prend pour folle « la folie d’la Prairie » (195).

UN PORTRAIT DE L’AMÉRIQUE DU 19ÈME SIÈCLE avec un humour toujours bien dosé et une fausse légèreté.

Le roman est plein d’humour mais aborde des thématiques telles que la quête d’identité ou le sort réservé aux populations indiennes (relocalisation, extermination) et noires (esclavage) à époque-là.

Great Turkey Walk de Kathleen Kaar Chronique littéraire O. CarolPar exemple, lorsque que Simon se rend compte que l’Indien qu’il a en face de lui s’exprime correctement et utilise un mouchoir pour s’essuyer la bouche après le repas, il lance: « Vous parlez d’un sauvage ! » (159).  Cela va à l’encontre du cliché de l’Indien sauvage si bien ancré dans la « mentalité blanche » et Simon, tout honnête et naïf qu’il est, réagit comme un enfant. On a alors M. Peece, le muletier, qui contrebalance cette naïveté et ajoute de la profondeur au propos, tout en gardant de l’humour.

On peut noter ce passage où M. Peece explique à Simon la relocalisation et l’appropriation des terres indiennes par le gouvernement :

[…] notre Etat éclairé du Missouri les a tous fichus dehors y a que’ques année. Les a expédiés un peu plus loin à l’ouest, quoi. Le gouvern’ment leur a raconté qu’il y avait là-bas plein de bonnes terres où ils pourraient s’établier pour toujours.

– Et alors ? j’ai demandé.

Peece a soupiré.

-Eh ben alors, « pour toujours » dans l’esprit des Indiens et « pour toujours » dans l’esprit des Blancs m’ont tout l’air d’être deux notions bien différentes, Simon. (143)

Un peu plus loin, un des Indiens explique qu’ils sont « enfermés dans une très petite boîte » (159), ce qui me rappelle la BD « La saison des flèches » dont je vous avais parlé il y a quelques temps.

Concernant  la quête d’identité, comme il s’agit d’un roman d’apprentissage, le héros (ou anti-héros, ici) vit toute une série d’événements qui finalement le transforment. Par exemple, la route de Simon et de ses dindes croise celle de son père qui l’a abandonné 15 ans plus tôt. Les sentiments de Simon face à ce père voleur et menteur évoluent tout au long de son voyage et de ses nombreuses rencontres. Il rencontre également une fille de son âge et vit ses premiers émois amoureux. A l’issue de ce voyage, Simon devient un homme, il devient « quelqu’un », ce qui était son objectif depuis le début (25) :

« On va faire une longue, longue marche. On va voir le monde. Et on va devenir quelqu’un. »

Turkey Walk Missouri Kathleen Kaar

J’ai adoré ce livre : les personnages, l’humour, l’ambiance, et surtout, l’idée de départ, inspirée d’une histoire vraie !

Dès 9 ans. Prix Bernard Versele (2001)

Medium Poche à l’Ecole des Loisirs. 6,80EUR.

1999 et réédité en 2018. (« The Great Turkey Walk », 1998)

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